Créée en 2001 par le gouvernement belge pour promouvoir le développement du secteur privé, BIO a la particularité d’avoir l’État belge comme unique actionnaire. BIO investit dans l’entrepreneuriat et le secteur privé, l’agriculture, la santé et l’éducation dans 52 pays en Asie, en Amérique latine, au Moyen-Orient en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne. 56 % des investissements sont consacrés à l’inclusion financière. 36 % du total des investissements ne sont pas des investissements directs mais des placements réalisés via des fonds de capital-investissement (FCI).
Un rapport de 2012 a révélé que BIO plaçait une part importante de ses investissements via des FCI dans des paradis fiscaux pour éviter l’impôt dans les pays où ces investissements sont réalisés. En 2019, un autre rapport a montré que BIO était impliquée dans des violations des droits humains et du travail dans le cadre de ses investissements dans la société canadienne Feronia, active dans le secteur de l’huile de palme en République démocratique du Congo.
Parmi ces violations, le rapport mentionne des assassinats au sein de la population vivant à proximité des exploitations, des intimidations, des arrestations et détentions arbitraires, le paiement tardif de salaires inférieurs au salaire minimum, mais aussi des violations du droit à l’alimentation, à un environnement sain, à la propriété foncière et au consentement préalable, libre et éclairé. En définitive, ce programme d’investissement s’est soldé par un échec économique et la faillite de la société Feronia, laissant derrière elle à la fois des témoignages de violences, des destructions de l’environnement et un développement local quasiment inexistant.
Face à cette situation et en prévision de la prochaine législation européenne sur le devoir de diligence, les syndicats belges ont adressé au gouvernement belge une série de recommandations majeures pour remédier aux échecs répétés de BIO et à son incapacité de contribuer efficacement à un véritable développement durable. La participation du secteur privé aux politiques de développement doit se traduire par le développement durable et le travail décent, soutenus par un véritable engagement des entreprises, afin de garantir le respect des droits du travail, des droits humains et des normes environnementales dans l’ensemble de leurs activités.
Recommandations
1. Adopter une approche globale du développement. BIO doit accorder la priorité aux normes sociales et environnementales, ainsi qu’à la gouvernance économique, lors de la prise de décision en matière d’investissement. Il s’agit notamment de privilégier l’emploi durable, le renforcement des capacités et la participation des travailleurs locaux, et d’intégrer des mesures de protection pour le développement écologique.
2. Définir des critères d’exclusion précis. BIO doit renoncer à tout investissement et projet pouvant avoir une incidence négative sur les droits humains, l’environnement et la société. BIO doit rejeter tout projet visant la commercialisation du secteur de la santé publique et l’éducation, empêchant un accès universel à ces services.
3. Privilégier les investissements socialement responsables. BIO doit accorder la priorité aux investissements dans des fonds de capital-investissement (FCI) ayant pour objectifs l’investissement social et la promotion des droits humains, des droits du travail et de la durabilité environnementale. Les investissements doivent cibler les petites et moyennes entreprises et soutenir les stratégies de transition de l’économie informelle à l’économie formelle.
4. Renforcer l’expertise interne. BIO doit renforcer son expertise interne concernant les droits humains, les droits du travail et les normes environnementales afin de réduire sa dépendance vis-à-vis des consultants externes. La collaboration avec les acteurs du développement tels que l’OIT et les partenaires sociaux locaux peut aider à renforcer cette expertise.
5. Renforcer le devoir de diligence. BIO doit mettre en place des processus continus en ce qui concerne le devoir de diligence, englobant la planification, le suivi, l’évaluation, les rapports et l’engagement avec les détenteurs de droits. Le processus doit prévoir la mise à disposition publique d’un plan en matière de diligence raisonnable et la consultation systématique des parties prenantes.
6. Transparence et accès à l’information. BIO doit assurer une plus grande transparence de ses chaînes de valeur et des FCI utilisés pour les investissements, notamment en ce qui concerne les modalités de paiement des impôts. Davantage d’informations sur les processus de diligence et des études d’impact sont également nécessaires.
7. Implanter un mécanisme de plainte efficace. Le mécanisme de plainte actuel de BIO doit être plus indépendant, plus efficace et plus facilement accessible aux victimes. BIO doit également mettre en place des procédures claires pour la médiation, l’accès à la justice, le recours collectif et la protection des dénonciateurs.
8. Contrôle externe et rapports. Le Parlement fédéral belge devrait être impliqué pour assurer la transparence et le contrôle externe. Des rapports annuels sur les activités de BIO pouvant avoir une incidence négative sur les droits humains doivent être publiés.
Les syndicats reconnaissent l’importance du développement durable et appellent BIO à adopter une approche fondée sur la primauté du droit. En faisant du devoir de diligence un processus de base, BIO pourra garantir que ses activités respectent les droits humains, les droits du travail et les normes environnementales. Les syndicats soulignent la nécessité pour BIO de rendre des comptes et de s’impliquer dans la réalisation d’objectifs de développement durable en utilisant des fonds publics pour ses investissements dans les pays en développement.
Pour de plus amples informations, veuillez contacter Karin.Debroey[@]acv-csc.be