Géorgie : Le coût humain du « succès » néolibéral

Les autorités géorgiennes tirent souvent orgueil de l’évaluation faite du climat des affaires dans leur pays par le rapport annuel « Pratique des affaires » (Doing Business) de la Banque mondiale. À l’heure actuelle, la Géorgie y occupe la 12e place sur 183 pays (2011), soit une progression d’une place par rapport à l’année précédente, juste devant la Finlande (13), la Suède (14) et loin devant l’Allemagne (22). Les événements tragiques survenus au cours des derniers mois dans les mines de Tkibuli dévoilent, cependant, une image bouleversante de l’impact social et du coût humain de cette « réussite. »

Le 22 janvier 2011, une explosion dans la mine de Tkibuli Mindeli à causé la mort d’un mineur et fait plusieurs blessés graves, qui ont dû être admis aux soins intensifs. L’accident n’a pas étonné outre mesure dès lors que des rapports faisaient état d’une concentration de gaz méthane supérieure à 6%. Les mineurs refusaient de descendre dans la mine mais ils s’y sont vus contraints par la direction. Durant les jours qui ont précédé la tragédie, deux autres équipes ont été forcées de descendre dans les galeries en dépit du risque élevé signalé.

Le piètre précédent établi par l’entreprise dans sa manière d’opérer envoie des signaux alarmants pour l’avenir: Neuf personnes ont trouvé la mort au cours des neuf derniers mois et de nombreuses autres ont été blessées. Il dénote en même temps un cynisme profond et une totale absence de prise de responsabilité dans la « pratique des affaires » en Géorgie. Un tel résultat est peu étonnant lorsqu’on prend en considération le code du travail unique qui élague les droits des travailleurs et syndicaux, qui décourage la négociation collective et qui a supprimé tout suivi et contrôle des conditions de travail, au même titre que les institutions spécialisées qui en avaient la charge. La Géorgie a le triste privilège d’être le seul pays à avoir aboli l’inspection du travail. Aussi, et cela n’étonne guère, la législation du travail suscite maintes plaintes et critiques de l’OIT depuis son adoption en 2006.

Suite au dernier incident survenu dans les mines Tkibuli Mindeli, les travailleurs se sont mis en grève pour revendiquer la protection de leurs droits et ceux des victimes de la politique irresponsable de la direction.

La CSI est extrêmement préoccupée par les développements en Géorgie et l’influence que ceux-ci commencent à avoir sur les systèmes de relations professionnelles émergents dans d’autres pays de la région. La CSI soutient vigoureusement les actions menées par les adhérents du Syndicat des travailleurs de la métallurgie, des mines et de l’industrie chimique, affilié à la GTUC, pour contraindre la direction et les autorités à respecter les droits de tous les travailleurs en Géorgie. Dans le même temps, la CSI continue à faire pression en soutien aux recommandations de l’OIT visant à rendre le code du travail et la législation connexe conforme aux normes du travail internationales. À sa deuxième réunion, le Comité des droits humains et syndicaux de la CSI a inclus la Géorgie au nombre des pays où les droits des travailleurs se trouvent menacés.

« Si les syndicats ont été reconnus et un accord signé à Tkibuli, ce n’est qu’à la suite d’une action collective radicale des travailleurs. Il y a beaucoup d’autres entreprises en Géorgie où les travailleurs sont déchus de leurs droits », a déclaré Sharan Burrow, secrétaire générale de la CSI. « Cette situation doit changer. La législation du travail doit être mise en conformité avec les obligations internationales de la Géorgie, la pression à l’encontre des syndicalistes doit cesser et l’agence spéciale chargée de la surveillance des conditions de travail rétablie », a-t-elle ajouté.