Guinée : Pression syndicale internationale sur les autorités

La Confédération syndicale internationale (CSI) renouvelle sa profonde inquiétude quant à la situation en Guinée. Alors que l’Intersyndicale guinéenne était réunie à Conakry pour faire le point après la sanglante répression qui avait fait au moins 30 morts Lundi, ses dirigeants ont été une nouvelle fois convoqués au palais du Président Lansana Conté, en milieu d’après-midi ce Mardi.

Bruxelles, 23 janvier 2007 : La Confédération syndicale internationale (CSI) renouvelle sa profonde inquiétude quant à la situation en Guinée. Alors que l’Intersyndicale guinéenne était réunie à Conakry pour faire le point après la sanglante répression qui avait fait au moins 30 morts Lundi, ses dirigeants ont été une nouvelle fois convoqués au palais du Président Lansana Conté, en milieu d’après-midi ce Mardi. La CSI étudie à présent toutes les mesures nécessaires pour contraindre le gouvernement guinéen à mettre un terme à la violence et entamer un dialogue constructif et ouvert avec les syndicats et la société civile. De source syndicale, la répression aurait fait au moins 42 morts depuis le début de la grève générale, le 10 janvier.

Plusieurs dizaines de syndicalistes, dont les Secrétaires généraux de ses organisations affiliées dans le pays, avaient été arrêtés Lundi par les bérets rouges de la Garde présidentielle (GP), qui avaient aussi saccagé la Bourse du Travail, siège des syndicats guinéens. Suivant les sources de la CSI à Conakry, les derniers syndicalistes détenus ont été libérés ce Mardi en début d’après-midi. Plusieurs sont retournés à la Bourse du Travail, qui a été dévastée, les soldats de la GP ayant démoli ou emmené avec eux ordinateurs et autres matériels. Toute la journée, des délégations d’avocats, de magistrats et de chefs religieux guinéens sont venus constater par eux-mêmes les dégâts, de même que les ambassadeurs de l’Union européenne, d’Allemagne (qui assure la Présidence de l’UE) et des Etats-Unis. Il se confirme que plusieurs syndicalistes ont été violement battus. Ibrahima Fofana, Secrétaire général de l’Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), souffre d’une blessure à l’œil, tandis que Rabiatou Sérah Diallo, son homologue de la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG), a été battue dans la nuque et aux reins.

Ce Mardi matin, une importante manifestation syndicale a rassemblé plusieurs centaines de participants au Forum social mondial à Nairobi (Kenya), défilant derrière une banderole appelant à la « Solidarité avec les travailleurs de Guinée – en défense de la démocratie et des droits des travailleurs ». Une délégation syndicale s’est réunie ce Mardi après-midi avec l’Ambassadeur de France à Nairobi, Elisabeth Barbier, qui lui a manifesté « l’inquiétude » de son gouvernement. Des efforts se poursuivaient aussi pour rencontrer le Président kenyan Mwai Kibaki et lui remettre une déclaration adoptée ce matin par les organisations syndicales régionales africaines présentes au Forum. Cette déclaration, adoptée au nom du mouvement syndical panafricain, en appelle notamment et « d’urgence à des négociations inconditionnelles, franches et sincères avec les travailleurs et travailleuses, afin de leur épargner des épreuves supplémentaires, vu la crise sans précédent dont ils et elles souffrent déjà ». La déclaration allait aussi être remise en début de soirée à l’Union africaine (UA).

A Genève, des représentants de la CSI ont noué des contacts avec le Groupe des pays africains de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et avec l’Ambassadrice de l’UA auprès des Nations unies. A Bruxelles, la CSI a poursuivi toute la journée des consultations avec ses organisations affiliées en Guinée, ainsi qu’aux niveaux africain et européen, afin de proposer une liste de mesures aux bailleurs de fonds internationaux, dont l’Union européenne (UE), la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Parmi les mesures étudiées figurent une suspension de l’aide structurelle et un gel des avoirs à l’étranger des plus hauts dirigeants guinéens. En décembre dernier, l’UE avait annoncé le déblocage d’une tranche d’aide du 9ème Fonds européen de Développement (FED), suspendu en avril 2005 suite à une « détérioration des principes démocratiques et de l’état de droit en Guinée ». La décision de reprise de l’aide européenne se fondait sur un accord entre le pouvoir et l’opposition quant à des élections démocratiques prévues pour Juin 2007 et des progrès en matière de liberté de la presse et de réforme des systèmes judiciaires et pénitentiaires. Pour la CSI, « l’ingérence du Président Conté dans les dossiers judicaires, la corruption des plus hautes sphères du pouvoir et les détournements de fonds généralisés battent en brèche l’optimisme de l’Union européenne ».

En accord avec les affiliées guinéennes de la CSI, son Secrétaire général, Guy Ryder, a déclaré ce midi à son retour de Nairobi « la détermination de la CSI à appuyer de toutes ses forces le mouvement de protestation légitime des syndicalistes guinéens ». Soulignant que la grève générale avait été déclenchée « sur base de revendications sociales et économiques transparentes », G. Ryder a ajouté que « le gouvernement guinéen porte l’entière responsabilité d’une répression qui a choqué la communauté syndicale dans le monde entier ». Il a affirmé aussi sa détermination à conduire « personnellement et dans les meilleurs délais » une mission de la CSI en Guinée et a exprimé son espoir que celle-ci se fasse « en étroite collaboration avec le Bureau international du Travail (BIT) au plus haut niveau ».

Créée le 1er novembre 2006, la CSI représente 168 millions de travailleurs au sein de 304 organisations affiliées nationales dans 153 pays.

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