Présidence indienne du G20 : le gouvernement de Narendra Modi décrié pour avoir refusé la participation des syndicats indépendants

photo: NOAH SEELAM AFP

La CSI et les organisations syndicales des 20 économies du G20 ont condamné la décision du gouvernement indien de suspendre, comme il le fait depuis plus de dix ans, la participation des syndicats indépendants à cet événement mondial de la plus haute importance.

Paradoxalement, à l’occasion du G20 de cette année, le gouvernement de Narendra Modi a bel et bien soutenu la participation des syndicats à la solde de son parti.

Depuis la crise financière mondiale de 2008, les syndicats indépendants sont consultés et invités aux sommets des chefs d’État et de gouvernement, aux réunions des ministres du Travail et de l’Emploi (LEMM) aux côtés des organisations patronales, ainsi qu’aux autres réunions du G20. Cette année, la LEMM se tiendra le 21 juillet dans la ville indienne d’Indore et, à ce jour, la CSI n’a toujours pas été invitée à y participer.

La CSI et la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC) ont créé et convoqué le groupe syndical L20, réunissant les organisations syndicales des pays du G20. Cette année, malgré plusieurs mois de négociations et de propositions de compromis concernant certaines questions mises sur la table par la CSI et les syndicats indiens indépendants, le gouvernement indien a insisté sur le fait que le L20 serait présidé par le syndicat indien des travailleurs Bharatiya Mazdoor Sangh (BMS), une confédération syndicale nationaliste hindoue proche du parti au pouvoir du Premier ministre Modi, qui se présentera aux élections de cette année.

La communauté syndicale mondiale condamne cette ingérence dans les activités des syndicats, qui porte clairement atteinte au principe de la liberté d’association. Une approche similaire a été adoptée pour le C20 de la société civile et le W20 des femmes.

Le comité chargé de coordonner 10 syndicats nationaux indiens, la plateforme des centrales syndicales Platform of Central Trade Union Organisations, a proposé de confier la présidence de cette réunion à l’Indian National Trade Union Congress (INTUC), une organisation affiliée à la CSI. Cette proposition est soutenue par les neuf autres confédérations syndicales, dont la plupart ne sont pas affiliées à la CSI.

La Déclaration du L20 au G20, utilisée par les syndicats pour faire pression sur les gouvernements dans les pays du G20, met en avant les principales revendications suivantes :

  • Promouvoir la justice sociale en respectant le droit de s’organiser, en participant à la négociation collective, en offrant une protection sociale et en augmentant le montant des salaires minimums de subsistance.
  • Garantir l’accès des pays en développement à des financements dans des conditions de stabilité financière, avec notamment un contrôle des capitaux, un filtrage des investissements et une réglementation financière.
  • Réformer et relancer le multilatéralisme, afin d’atteindre les objectifs mondiaux communs, et assurer une cohérence entre le Programme de Doha pour le développement, l’Accord de Paris sur le climat, le Programme 2030 et la Déclaration du centenaire de l’OIT.

Dans la mesure où les autorités indiennes s’opposent à la participation de la CSI et de la TUAC à la LEMM de cette année, il appartiendra aux autres gouvernements de soulever ces questions cruciales pour les travailleurs.

Le secrétaire général par intérim de la CSI, Luc Triangle, a déclaré : « Cela fait des années maintenant que les pays qui président le G20 reconnaissent la plus grande confédération syndicale indépendante du monde dans son rôle de représentante des travailleurs aux sommets du G20. Ce principe a été respecté, y compris par la Chine et l’Arabie saoudite, deux pays où les syndicats indépendants sont inexistants. Pourtant, le gouvernement de l’Inde, la plus grande démocratie du monde qui compte un mouvement syndical indépendant et dynamique, accueillera le pire des G20 jamais organisés en termes de représentation des travailleurs. »

Tandis que le BMS, soutenu par le gouvernement, organisera les événements fantoches du L20, la CSI et la TUAC convoqueront des réunions du L20 en ligne, auxquelles participeront la majorité des membres des syndicats indiens et des autres pays du G20.