CSI - Rapport annuel des violations des droits syndicaux : La répression contre les syndicats a coûté la vie à 91 personnes en 2007

La dernière édition du Rapport annuel des violations des droits syndicaux de la CSI lève le voile sur une succession accablante de lois antisyndicales, de menaces et de violences contre des représentants des travailleurs en 2007, avec un solde tragique de 91 syndicalistes assassinés de par le monde pour avoir défendu les droits des travailleurs.

Bruxelles, le 20 novembre 2008 : La dernière édition du Rapport annuel des violations des droits syndicaux de la CSI lève le voile sur une succession accablante de lois antisyndicales, de menaces et de violences contre des représentants des travailleurs en 2007, avec un solde tragique de 91 syndicalistes assassinés de par le monde pour avoir défendu les droits des travailleurs. La Colombie se positionne une fois de plus en tête des pays les plus meurtriers pour les syndicalistes, avec 39 assassinats. Elle est suivie de la Guinée, où le régime du président Lansana Conte a été directement responsable de l’assassinat de 30 syndicalistes durant la répression brutale contre des manifestations publiques organisées par les syndicats contre la corruption et les atteintes aux droits fondamentaux. Le Rapport de la CSI a mis en exergue une nouvelle spirale de violence au Guatemala, où les attaques ont été de plus de plus en plus ciblées contre les syndicats, comme en témoignent les meurtres de 4 syndicalistes, outre une augmentation sensible des menaces et des harcèlements.

Le Rapport annuel, qui couvre les violations des droits des travailleurs dans 138 pays, révèle une série de développements inquiétants, y compris la collusion entre des gouvernements et des employeurs pour spolier les travailleuses et les travailleurs de leurs droits légitimes à adhérer et à être représentés par des syndicats. Des atteintes graves, y compris harcèlements et intimidations, ont été rapportées dans 63 pays. Au cours de 2007, 73 syndicalistes ont été incarcérés, dont 40 rien qu’en Iran, où la répression systématique à l’encontre des travailleuses et travailleurs s’organisant dans les secteurs du transport et de l’éducation, entre autres, s’est poursuivie. Quatorze syndicalistes ont été internés au Maroc et 7 en Birmanie, où la junte s’est livrée à une véritable traque aux syndicalistes, dans le cadre de sa politique de répression brutale contre toute mobilisation en faveur de la démocratie et des droits humains.

« La répression contre des activités syndicales légitimes garanties en vertu des Conventions de l’OIT s’est poursuivie sans répit dans tous les continents. Le meurtre, la violence et la torture, outre le harcèlement, les licenciements illégaux et l’incarcération ont fait partie des procédés employés pour empêcher des travailleuses et des travailleurs de s’organiser en syndicats et d’entreprendre des négociations collectives pour des meilleurs salaires et conditions de travail. Plusieurs gouvernements se sont empressés de soutenir les employeurs, de façon détournée ou ouverte, dans leurs tentatives de bafouer les droits fondamentaux de leurs salariés », a déclaré Guy Ryder, secrétaire général de la CSI. « Les gouvernements ont négligé de faire le nécessaire pour protéger les droits des travailleurs, que ce soit à l’échelle nationale ou dans le cadre de leurs relations diplomatiques, économiques et commerciales internationales. »

De nouveaux dispositifs juridiques et administratifs restreignant les activités syndicales ont été institués dans 15 pays, au mépris des Conventions de l’Organisation internationale du travail, principalement en Asie mais aussi au Tchad, au Ghana, à Madagascar, à Maurice, en Tanzanie et en Géorgie, où environ 20.000 travailleurs ont été licenciés par des entreprises qui ont tiré parti du nouveau code du travail national qui prive les salariés de leurs protections les plus fondamentales. Pendant ce temps, la Biélorussie, « dernière dictature d’Europe », a entretenu sa piètre réputation en se livrant à des violations graves et systématiques des droits syndicaux.

Dans plusieurs pays du continent africain, les employeurs ont tiré parti de failles dans la législation du travail pour fomenter et encourager des divisions dans les rangs des syndicats et créer des groupes contrôlés par le patronat, pour saborder la représentation légitime des travailleurs. L’hostilité ouverte contre les tentatives de syndicalisation a également figuré à l’ordre du jour au Zimbabwe et au Swaziland, qui faisaient, tous deux, partie d’une liste de pays où des chantiers possédés et financés par des entreprises chinoises ont été dénoncés pour leurs conditions de travail précaires et l’exploitation abusive de la main-d’œuvre. Outre la Guinée, le Rapport annuel a également signalé des assassinats de syndicalistes en Ethiopie, au Mozambique et au Zimbabwe.

La restriction des activités syndicales légitimes a également persisté dans divers pays industrialisés où les salariés du secteur public, notamment, se sont vus privés de leurs droits syndicaux. Les jugements rendus dans les affaires « Viking » et « Laval », dans l’Union européenne, ont sérieusement remis en cause des droits qui étaient jusque là considérés comme acquis, alors qu’aux Etats-Unis et en Australie, les gouvernements Bush et Howard ont intensifié leur hostilité envers l’organisation syndicale. Un développement encourageant est à signaler cependant avec l’éviction du gouvernement Howard à l’issue des élections australiennes en novembre 2007, où l’électorat a exprimé son opposition à la tristement célèbre « loi sur les choix en matière de travail » (Work Choices), qui occupait une place prépondérante dans la campagne électorale.

Les travailleuses et travailleurs migrants ont été soumis à une exploitation et à des abus criants et ont souvent été privés de tout droit de syndicalisation ou de représentation. Les pires atteintes se sont concentrées dans la région du Moyen-Orient, où les rapports ont fait état de la mort de plusieurs ouvriers de la construction pour cause de conditions de vie et de travail épouvantables, notamment au Qatar.

De nombreuses violations des droits des travailleurs ont été rapportées dans les zones franches d’exportation (ZFE) des pays du Moyen-Orient, à l’instar d’un grand nombre de ZFE de par le monde. L’attention a une fois de plus été retenue par la situation accablante et l’exploitation flagrante de la main-d’œuvre migrante au niveau de cette région. En Arabie Saoudite, où toute forme d’organisation des travailleurs est strictement contrôlée par les autorités, quatre employées domestiques indonésiennes ont été violemment battues par leurs patrons, au point que deux d’entre elles ont succombé à leurs blessures. Les deux autres ont, quant à elles, été expulsées de force de l’hôpital par la police. En Irak, deux syndicalistes, dont un a été enlevé et torturé, ont été exécutés pour leurs activités syndicales.

Les travailleuses et travailleurs migrants ont également souffert en Asie, où l’on retient, en particulier, l’élimination par le gouvernement du syndicat des travailleurs migrants en Corée du Sud et la non-reconnaissance du droit d’organisation aux travailleuses et travailleurs migrants au Brunei, en Thaïlande et à Singapour. L’activité syndicale a été sérieusement entravée sous le régime militaire au Pakistan et institutionnellement interdite au Bangladesh. La Chine a, une fois de plus, occupé une place importante dans le Rapport en raison de violations massives, alors que la dictature en Corée du Nord a, elle aussi, maintenu son interdiction totale sur l’organisation syndicale légitime. De nouveaux meurtres de syndicalistes ont été rapportés au Cambodge et aux Philippines.

L’Amérique latine est restée le continent le plus dangereux pour l’activité syndicale en 2007, avec des assassinats, des enlèvements, des menaces de mort et des attaques dans plusieurs pays. Si une légère baisse a été enregistrée dans le nombre d’assassinats en Colombie par rapport à l’année antérieure, il convient de signaler de nombreuses tentatives d’assassinat manquées, outre une augmentation sensible des expulsions forcées, des arrestations arbitraires, des perquisitions illégales et des menaces, plus particulièrement dans l’agriculture, la santé et l’éducation. Avec le Guatemala, les rapports ont également fait état de meurtres en Argentine, au Brésil, au Chili, au Salvador, au Mexique, au Panama et au Pérou.

Le Rapport annuel évoque, par ailleurs, une série de développements inquiétants qui sont devenus de plus en plus apparents en 2007 et se sont poursuivis durant l’année en cours. Nombre de gouvernements ont élargi leur définition des « services essentiels » pour restreindre les droits de syndicalisation et de négociation collective des travailleurs, notamment dans le secteur public. On a également assisté à une augmentation notable de la répression des droits des travailleurs dans le secteur des médias, où les journalistes ont fait face à une hostilité grandissante de la part de gouvernements soucieux d’éviter tout examen public. L’un des développements les plus alarmants et récurrents à travers le rapport concerne les démarches systématiques des directions d’entreprises nationales et multinationales, souvent facilitées par des dispositions législatives, pour remplacer des postes à plein temps et permanents par des emplois précaires, forçant les travailleuses et travailleurs à accepter des contrats temporaires et à temps partiel. Cette tendance a entraîné une réduction des revenus et de la sécurité de l’emploi, exposant les travailleuses et travailleurs à un traitement inéquitable et injustifié, y compris le risque de perdre leur gagne-pain, généralement sans préavis et sans la moindre indemnisation. De nombreuses entreprises ont procédé de la sorte, en remplaçant des postes fixes par de la « main-d’œuvre temporaire », se soustrayant ainsi à leurs obligations et à leurs responsabilités légales.

« On assiste à l’émergence, à l’échelle mondiale, de tendances telles que la précarisation et la sous-traitance, qui représentent une menace colossale pour les travailleurs et travailleuses de par le monde. Cette menace risque de se diffuser et de s’intensifier à mesure que la situation économique se dégrade, et les gouvernements sont donc appelés à agir de façon responsable pour garantir des emplois sûrs et décents à un moment où les travailleurs et la revitalisation de l’économie mondiale en ont le plus besoin », a déclaré Ryder.

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Pour le communiqué sur l’Afrique, veuillez cliquer ici

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