Le ralentissement mondial et la crise des réfugiés requièrent une action extraordinaire de la part du G20

La situation économique mondiale fragile fait ombrage à la réunion des ministres du Travail et des Finances des pays du G20 qui se tient à Ankara sous la présidence turque. On est en effet dangereusement loin des cibles de croissance fixées et les échanges commerciaux ont connu leur baisse la plus sensible depuis 2009 au cours du premier semestre de 2015.

Les organisations syndicales, sous la bannière du Groupe syndical 20 (L20), se sont adressées aux ministres en soulignant le besoin de mener une action coordonnée en vue d’investir dans les emplois, de soutenir des salaires minimums vitaux et la négociation collective, d’établir des objectifs pour l’emploi des jeunes et de s’assurer que les investissements responsables répondent à ces nécessités stratégiques.
Les nouveaux chiffres du Fonds monétaire international indiquent que les cibles de croissance établies par le G20 à Brisbane sont à la traîne, accusant un écart de 3 % entre ce qui avait été fixé et la situation économique mondiale actuelle.

« La croissance devrait plus que doubler pour correspondre aux cibles établies l’année dernière par le G20. Les dirigeants des pays du G20 sont confrontés à un problème de crédibilité et nous intimons les ministres du Travail de mettre en garde les ministres des Finances. Nous avons besoin de mesures qui peuvent générer des emplois grâce à des investissements responsables dans les infrastructures et qui augmentent le pouvoir d’achat et les salaires alors que les inégalités de revenus ont atteint un point critique », a déclaré John Evans, secrétaire général de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC-OCDE).

La menace que constitue l’insécurité du revenu croît comme l’indique le sondage d’opinion « Nouveaux fronts » 2015 de la CSI où 55 % des personnes interrogées dans neuf pays représentant la moitié du PIB mondial ont estimé que leurs finances stagnaient ou diminuaient.

« Les économies émergentes perdent des emplois, le mécontentement social croît, le chômage des jeunes devient structurel, la part des salaires refuse rebondir, les attaques portées aux salaires minimums et à la négociation collective accentuent la pauvreté des ménages. Des salaires équitables versés le long des chaînes d’approvisionnement mondiales augmenteraient la demande et aideraient à faire croître l’économie mondiale », a expliqué Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale.

Pour la deuxième fois seulement depuis la création du G20, les ministres du Travail et des Finances des pays qui en sont membres se réunissent à Ankara, ce qui devrait servir de catalyseur pour des mesures politiques cohérentes.

Les recommandations du L20 comprennent :

  • Une hausse de l’investissement dans les emplois et les salaires. La modélisation de la croissance du L20 montre que l’abandon des politiques actuelles en faveur d’une augmentation de l’investissement public dans les infrastructures de 1 % du PIB dans les pays du G20 pourrait générer une croissance supplémentaire de 3,8 % pendant une période de cinq ans ;
  • L’augmentation de la participation des femmes au marché du travail et des investissements dans les structures de garde des enfants et dans l’économie des soins pour atteindre la cible du G20 de réduction de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes de 25 % d’ici 2025 ;
  • Une nouvelle cible ambitieuse pour l’emploi des jeunes et des garanties pour la jeunesse, étant donné que le chômage pour cette tranche d’âges est en moyenne supérieur d’un tiers par rapport à 2007, à l’exception de l’Allemagne. La part des jeunes qui sont sans emploi et ne suivent ni études ni formation (NEET) est proche de 20 % en moyenne dans les pays industrialisés et plus élevée dans les économies émergentes. Rien que dans les économies du G20, on dénombre 150 millions de NEETs peu qualifiés ;
  • Une garantie pour les personnes qui fuient les conflits de bénéficier du droit au travail et à la protection sociale.

« Le monde connaît la pire crise des réfugiés depuis la Deuxième Guerre mondiale et le silence des dirigeants est assourdissant. Des citoyens du monde prennent les devants et ouvrent leurs portes aux réfugiés. La crise des réfugiés mondiale est une crise économique, et les dirigeants des pays du G20 doivent adopter des actions coordonnées pour garantir le droit au travail et à la protection sociale des réfugiés », a poursuivi Sharan Burrow.

Le sondage d’opinion « Nouveaux fronts » 2015 de la CSI dans des économies productrices, Indonésie, Philippines et Turquie, a établi que :

  • la moitié de tous les travailleurs estiment que leur emploi est devenu moins sûr ces 12 derniers mois ;
  • 58 % s’attendent à ce qu’un membre de la famille perde son emploi d’ici les 12 prochains mois ; et
  • 63 % se disent stressés par leur emploi et la sécurité des revenus.

« Les membres du G20 ont une chance de placer le monde du travail sur une trajectoire différente. Les travailleuses et les travailleurs attendent des recommandations extraordinaires en ces temps hors du commun. Les vies et les moyens de subsistance des travailleurs, de leurs familles et communautés dépendent des décisions des ministres du Travail et des Finances. Les discussions ne doivent pas céder le pas à des justifications pour des politiques ratées », a conclu John Evans