Déclaration de Madrid

DÉCLARATION DE MADRID
Madrid, le 16 octobre 2014

Les organisations membres de l’Alliance espagnole contre la pauvreté (Alianza Española contra la Pobreza) et leurs partenaires signataires de la présente déclaration affirment :

  • La pauvreté dans toutes ses manifestations et dimensions constitue un grand problème de l’humanité mais qui est aussi un problème causé par l’activité humaine et dont les solutions dépendent de notre capacité à nous organiser collectivement en tant qu’êtres humains.
  • Nous partageons en tant que base fondamentale pour la compréhension adéquate de la problématique et comme horizon pour tenter de développer toutes les solutions collectives la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et sa nature indissoluble et indivisible.
  • Nous saluons la volonté politique partagée par les représentants de tous les États et gouvernements du monde eu égard à la recherche de solutions à la problématique du développement mondial dans toutes ses dimensions.
  • Nous considérons comme une expression de cette volonté l’établissement, en 2000, des Objectifs du millénaire pour le développement et d’une date butoir pour l’exécution desdits objectifs fixée à 2015 qui ont permis une compréhension et une participation accrues des associations et des citoyens de cette planète face aux défis internationaux et contribué à raffermir l’engagement en vue de leur réalisation.
  • De la même manière, nous reconnaissons aussi que cette période nous permet de tirer des leçons à partir de preuves qui attestent de limitations sérieuses et de failles qui devront être corrigées sans détours et de manière résolue : D’une part, l’incapacité à mobiliser des ressources suffisantes aussi bien au plan national que depuis une perspective globale, pour investir de façon intensive dans des politiques de développement cohérentes avec les objectifs communs ; d’autre part, le développement insuffisant d’institutions de gouvernance mondiale permettant aux gouvernements d’articuler de manière coordonnée et responsables leurs politiques de développement vers un objectif commun. À ce titre, il convient de rappeler les propos du secrétaire général des Nations Unies : « Des lacunes sont apparues non parce que les objectifs sont irréalisables ou parce que le temps manque, mais à cause d’engagements non tenus, de ressources inadéquates et d’un manque d’orientation et de responsabilisation. »
  • Nous constatons comment l’absence de mécanismes de coordination érode la capacité des gouvernements à répondre aux besoins des citoyens et empêchent que le programme de développement mondial et la répartition des richesses mondiales occupent une place prééminente par rapport aux autres priorités politiques ou économiques.
  • Nous observons comment les différents efforts présentent des limites en raison de leur nature sectorielle, dénotant leur incapacité à transformer aux plans politique et structurel les principales causes génératrices de pauvreté, d’exclusion et d’inégalité, rendant par-là même indispensable une prise en considération collective de la formulation et de l’orientation des politiques socioéconomiques (commerciales, financières, fiscales, énergétiques, migratoires, sécuritaires, etc.…) aux fins d’y intégrer les perspectives de droits, d’égalité hommes-femmes, de travail décent, de développement, de viabilité et de protection sociale.
  • Nous reconnaissons, néanmoins, l’existence d’une importante doctrine partagée et l’engrangement de connaissances scientifiques et techniques suffisantes de la part du monde intellectuel et scientifique pour pouvoir aborder des solutions réalistes et raisonnables aux manifestations les plus dramatiques et manifestes de l’inégalité et de la pauvreté mondiales.
  • Nous sommes conscients de la profonde complexité des problématiques du développement, elle-même attribuable à leur nature pluridimensionnelle ; raison pour laquelle nous sommes aussi conscients du fait qu’il convient de tenir compte des multiples intérêts en jeu dans toute leur complexité. Cette réalité pluridimensionnelle requiert en soi une prise en compte des savoirs disponibles à partir des différentes perspectives et disciplines aux fins de formuler des programmes politiques cohérents et communs fondés sur une vision du développement qui relève de l’intérêt général de notre génération et des générations futures.
  • Nous considérons que dans le domaine spécifique – quoique lui aussi pluridimensionnel et complexe – du changement climatique, l’existence et le travail du Panel intergouvernemental sur le changement climatique a contribué à focaliser et centrer le programme d’action, de même qu’à proposer des solutions partagées et à accroître la capacité des citoyens à assurer le contrôle des engagements pris par les gouvernements.
  • À l’instar du changement climatique, la question de l’inégalité et de la pauvreté mondiales requiert une approche scientifique et technique qui combine de manière adéquate les différents types de connaissance, qui intègre des preuves et des arguments issus des sciences naturelles et des sciences sociales et qui orientent de façon continue l’élaboration des programmes politiques mondiaux des gouvernements en matière de développement.
  • À ce propos, nous saluons l’appel lancé par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 67/290 où elle exprime la nécessité de rapprocher la science et la politique « en rassemblant les informations et les évaluations dispersées, notamment sous la forme d’un rapport mondial sur le développement durable, en s’inspirant des évaluations existantes, en contribuant à ce que la prise de décisions s’appuie davantage sur l’analyse des faits à tous les niveaux et en concourant à l’intensification des efforts engagés pour renforcer les capacités de collecte et d’analyse des données dans les pays en développement ».
  • Nous considérons nécessaire la création d’une entité pluridisciplinaire composée de professionnels des sciences et d’intellectuels issus à la fois des milieux académique, institutionnel et social qui, en concertation avec les gouvernements et moyennant le plus haut degré de légitimité et de représentativité, puissent offrir des synthèses fréquentes sous forme d’orientations pour les politiques de développement des gouvernements, des institutions internationales et de la communauté internationale en général.
  • Nous considérons que ladite entité devra inclure des experts du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest qui travaillent toute l’année sur les thèmes de la pauvreté et de l’inégalité dans chacun des pays concernés. Des personnes expertes qui apportent des solutions pour chaque pays et permettent d’unir la science et la politique, afin que les décisions, ancrées dans l’autorité et la rigueur de la science, soient applicables par la volonté politique fondée sur l’intérêt général et par-delà les générations.

À la lumière de tout ce qui précède, nous soutenons la proposition de l’Alliance espagnole contre la pauvreté (Alianza Española Contra la Pobreza) portant sur la création d’un Panel permanent qui nous permette de suivre la lutte contre la pauvreté et l’inégalité et la concrétisation des Objectifs du millénaire pour le développement tels qu’énoncés dans l’agenda pour l’après-2015 et qui formule des orientations politiques pour l’action des gouvernements et de l’Organisation de Nations Unies elle-même.
Pour une vie digne pour tous les habitants de cette planète unique.