En décembre 2020, avant la crise énergétique actuelle en Europe, le gouvernement danois a adopté une loi contraignante pour la neutralité climatique d’ici 2050. Cette loi prévoit l’abandon progressif de l’extraction du pétrole et du gaz par des mesures de Transition juste et le renoncement au cycle actuel d’octroi de licences.
Selon Oliver Warwick, de la confédération syndicale danoise FH, les syndicats ont salué les objectifs ambitieux du gouvernement, à une exception près : l’annulation du dernier cycle d’octroi de licences, qui n’aurait pas d’impact sur les objectifs climatiques, mais bien un impact négatif sur les travailleurs et travailleuses.
Lors du sommet de la mer du Nord qui s’est tenu en 2022 au Danemark, les dirigeants d’Allemagne, de Belgique et des Pays-Bas ont annoncé un objectif commun : multiplier par quatre la capacité éolienne en mer d’ici 2030, et par dix d’ici 2050.
“Un tel investissement dans les énergies renouvelables nécessite également un investissement important dans la formation et la requalification. Les partenaires sociaux ont créé une académie offshore où les syndicats et les entreprises s’assurent que les compétences des travailleurs et travailleuses correspondent aux compétences requises dans le secteur naissant,” a indiqué Oliver Warwick.
Anya Kartoffel du syndicat ver.di, d’Allemagne, a expliqué que les syndicats allemands ont été fortement impliqués et ont soutenu le plan national pour éliminer progressivement le recours au charbon. Cependant, avec la crise actuelle et la dépendance du pays au pétrole et au gaz importés de Russie, il est difficile de poursuivre le démantèlement de la filière charbon selon le calendrier initial.
Bien que confrontée à la même crise que le reste de l’Europe, l’électricité en France est décarbonée grâce à la production d’énergie nucléaire.
“Nous devons investir dans une consommation d’énergie efficace et les entreprises impliquées dans la transition énergétique doivent investir dans la formation d’une main-d’œuvre qualifiée pour la dite transition,” a précisé Christophe Beginet de la CFDT, France.
La centrale syndicale néerlandaise FNV soutient les politiques climatiques du gouvernement mais insiste sur la création de fonds pour le charbon afin de soutenir les travailleurs et travailleuses en transition. La FNV s’efforce d’influencer les fonds de pension néerlandais pour qu’ils se désengagent des industries fossiles et investissent plutôt dans des industries plus durables. En collaboration avec le gouvernement et les entreprises, les syndicats travaillent sur une plateforme pour une conduite responsable du secteur des énergies renouvelables.
Sur le continent américain, la situation des syndicats est plus encourageante. Aux États-Unis, la loi sur la réduction de l’inflation vise à créer des emplois dans le secteur de l’énergie propre, à stimuler les investissements dans les énergies renouvelables, à revitaliser le secteur manufacturier et à réduire les coûts des soins de santé. Cette loi devrait permettre de créer 1,5 million d’emplois dans les secteurs de la construction et de la fabrication.
“C’est la première fois que nous avons quelque chose qui ressemble à une politique industrielle aux États-Unis, surtout s’agissant d’une politique axée sur le climat et l’énergie,” a commenté Brad Markell de l’AFL-CIO.
“Il s’agit d’une évolution positive, même si la transition elle-même suscite encore des inquiétudes. L’augmentation de la part des énergies propres entraînera une réduction de l’utilisation du charbon et du pétrole, ainsi que des véhicules à combustion interne. Mais s’agissant des travailleurs et travailleuses de ces secteurs, il n’y a toujours pas de dispositions les concernant. La loi a ses limites et les syndicats continueront à se battre,” a conclu Brad Markell.
Daniel Gaio de la CUT, Brésil, a fait le point sur les élections à venir et sur les engagements de l’ancien président Lula en faveur de davantage d’actions sur le changement climatique et la Transition juste.
“Le gouvernement Bolsonaro a été calamiteux pour l’environnement et pour les travailleurs. Il a annulé les investissements de Petrobras, la compagnie pétrolière et gazière publique brésilienne, dans les énergies renouvelables, privant ainsi l’État d’un outil essentiel pour mener la Transition juste. La privatisation et le recours accru à des travailleurs en sous-traitance au sein de Petrobras ont entraîné des pertes d’emplois, tout en aggravant la situation. Mais nous avons de grands espoirs pour l’éventuel retour d’un gouvernement sous l’autorité de Lula,” a indiqué Daniel.
Les syndicats canadiens se sont battus pour obtenir une loi nationale sur la Transition juste, attendue à la fin de cette année ou au début de 2023. Selon Tara Peel, du Congrès du travail du Canada, la principale leçon à tirer du groupe de travail canadien sur la Transition juste pour l’élimination progressive du charbon est que les syndicats doivent avoir plus qu’un rôle consultatif.
“Nous devons avoir une place à la table où se prennent les décisions et c’est bien la revendication du Congrès du travail du Canada et de ses affiliés.”
Sari Saarinen, d’Unifor Canada, a déclaré que des mesures réelles sont nécessaires et que les travailleurs et les communautés concernées doivent faire partie de la transition afin de garantir des emplois bien rémunérés au sein de ces communautés.
“C’est là le véritable défi et ce qui manque, ce sont des politiques industrielles et sectorielles ainsi que des formations pour fournir les compétences à la prochaine génération de travailleurs et travailleuses. Il s’agit d’un rôle clé que les gouvernements, tant fédéral que provinciaux, doivent assumer,” a indiqué Sari Saarinen.
Cette initiative sur la Transition juste, organisée par la Confédération syndicale internationale (CSI), LO Norvège et IndustriALL, offre aux syndicats une plateforme mondiale pour échanger des informations sur la Transition juste dans la chaîne de valeur du pétrole et du gaz.