Le traitement scandaleux des travailleurs pendant la pandémie, révélé par l’Indice CSI des droits dans le monde

L’Indice CSI des droits dans le monde 2021 montre que certains gouvernements et employeurs ont tiré profit de la pandémie de Covid-19 pour attaquer les droits des travailleurs. Notre rôle est d’utiliser l’Indice des droits dans le monde 2021 pour dénoncer ces violations et faire pression en faveur d’un nouveau contrat social pour les travailleurs qui repose sur l’emploi, les droits, la protection sociale, l’égalité et l’inclusion.

Cette huitième édition de l’Indice des droits dans le monde établit un classement de 149 pays en fonction de la manière dont ils respectent les droits des travailleurs. Pour la première fois, il comporte une plateforme interactive permettant de visualiser, par pays et région, les cas de violations des droits et le classement national. Il s’agit d’une analyse complète des droits des travailleurs par rapport à la loi, qui offre une base de données unique en son genre.

L’Indice des droits dans le monde se fait l’écho d’une situation inacceptable.

Pendant que les travailleurs se retrouvaient en première ligne au moment de la crise sanitaire pour assurer les services essentiels et faire en sorte que les économies et les collectivités puissent continuer de fonctionner, des gouvernements et des entreprises ont agi de manière honteuse à l’encontre des travailleurs, comme le souligne l’Indice des droits 2021, allant parfois jusqu’à prendre pour cible ceux qui révélaient des informations vitales sur le virus et dénonçaient leurs conditions de travail.

En Afrique du Sud, l’entité Volkswagen-Afrique du Sud (VWSA) a licencié des délégués syndicaux pour avoir « incité » les employés à cesser le travail après avoir signalé qu’un nombre important de travailleurs avaient été testés positifs à la Covid-19. Au Pérou, Falabella, une entreprise multinationale spécialisée dans la vente d’articles de maison, a licencié 22 magasiniers qui avaient demandé des protections de santé et de sécurité contre le virus. Au Cambodge, le Service de gestion aéroportuaire cambodgien a suspendu les négociations collectives en raison de la pandémie, laissant l’entreprise imposer des interruptions de travail unilatéralement dans les trois aéroports du pays sans consulter le syndicat.

Le nombre de pays dont les autorités ont fait obstacle à l’enregistrement de syndicats a bondi de façon inquiétante, passant de 89 pays en 2020 à 109 en 2021. Certains pays ont par ailleurs réprimé l’activité syndicale indépendante, comme le Belarus, l’Égypte, El Salvador, la Jordanie, Hong Kong, le Kirghizistan et l’Irak. Priver les travailleurs de leur droit à être représentés pendant une pandémie mondiale est abject.

Les dix pires pays au monde pour les travailleurs en 2021 sont le Bangladesh, le Brésil, la Colombie, l’Égypte, le Honduras, les Philippines, la Turquie, le Zimbabwe et, pour la première fois, le Belarus et le Myanmar.

Neuf pays reculent dans le classement : la Belgique, le Canada, El Salvador, Haïti, la Hongrie, la Jordanie, la Malaisie, le Myanmar et la Slovaquie.

Cinq nouveaux pays sont entrés dans le classement en 2021 : l’Arménie, le Gabon, la Guinée, le Kirghizistan et le Niger. L’Arabie saoudite n’a pas été classée mais l’ampleur de sa nouvelle Initiative sur la réforme du travail est en cours d’évaluation et de mise en œuvre.

Une dégradation généralisée des droits, mais quelques points positifs à noter

L’Indice des droits dans le monde 2021 fait apparaître une détérioration de la plupart des critères relatifs aux droits des travailleurs.

En effet, 87 % des pays ont bafoué le droit de grève. Les grèves organisées au Belarus, en Indonésie et aux Philippines pour protester contre des gouvernements autoritaires, et au Myanmar contre la junte militaire, ont été réprimées dans la violence.

En outre, 79 % des pays ont enfreint le droit de négociation collective. Dans toutes les régions, la négociation collective est mise à mal, et elle a été utilisée par les gouvernements autoritaires du Belarus, du Brésil, du Honduras, de Hongrie et de Hong Kong pour mettre en pièces le principe essentiel de la démocratie au travail.

Dans 74 % des pays, les travailleurs sont complètement exclus du droit de créer un syndicat et d’adhérer à un syndicat.

Les travailleurs ont été confrontés à la violence dans 45 pays et des syndicalistes ont été tués dans six pays : Brésil, Colombie, Guatemala, Myanmar, Nigeria et Philippines. La région interaméricaine est la plus meurtrière pour les travailleurs : 22 syndicalistes ont été assassinés rien qu’en Colombie.

Le nombre de pays dans lesquels la liberté d’expression et de réunion est refusée aux travailleurs, ou limitée, est passé de 56 en 2020 à 64 en 2021, avec des situations extrêmes constatées à Hong Kong et au Myanmar.

L’accès des travailleurs à la justice était inexistant ou restreint dans 65 % des pays et les travailleurs ont fait l’objet d’arrestations et de détentions arbitraires dans 68 pays. Les arrestations de dirigeants syndicaux au Cambodge, à Hong Kong et au Myanmar ont particulièrement attiré l’attention en 2021.

Une nouvelle tendance inquiétante concerne la hausse de la surveillance des travailleurs et des atteintes au droit à la vie privée. Aux États-Unis, une surveillance illégale ou déloyale a été signalée chez Facebook et Google. Le scandale de la surveillance des employés d’Amazon en Europe et aux États-Unis a connu un retentissement mondial.

Cependant, il y a une lueur d’espoir dans ce sombre tableau. Il est prouvé que la dégradation des droits des travailleurs n’est pas inévitable, c’est une question de choix. Six pays ont vu leur classement évoluer favorablement : la Bolivie, la Grèce, le Mexique, le Panama, le Soudan et le Togo.

Parmi les améliorations au niveau législatif, il convient de citer la loi PRO Act aux États-Unis, ainsi que les processus relatifs à la diligence raisonnable dans les pays de l’Union européenne, exigeant que les entreprises rendent des comptes.

Toutefois, cela ne sera pas suffisant pour rétablir la confiance qui a été anéantie par des gouvernements répressifs et des entreprises aux pratiques abusives. Un nouveau contrat social sera nécessaire pour promouvoir les emplois de qualité, les droits, la protection sociale, l’égalité et l’inclusion.

Vous pouvez consulter le site www.globalrightsindex.org dès maintenant. Utilisez ce rapport comme outil de campagne afin de montrer le travail à réaliser pour bâtir une économie qui ne laisse personne de côté, et le prix à payer pour tout le monde lorsque les droits des travailleurs sont méprisés ou bafoués.

C’est grâce aux travailleurs que les communautés sont restées unies pendant la pandémie mondiale. S’ils sont attaqués, s’ils sont privés de droits et de protections, ils ne sont plus en mesure de s’occuper de l’économie, et les gouvernements ne peuvent ignorer le risque et les préjudices que cela représente pour nos démocraties et nos économies.