"L’UE méconnait le rôle de l’État en tant qu’acteur du développement"

Le 25 Juin 2014, Marita Gonzalez, CGT Argentine, s’est addressée à la Commission Européenne suite à sa communication sur le secteur privé:

"La Communication de l’Union européenne sur le renforcement du secteur privé dans la coopération au développement a contourné le mécanisme de dialogue politique établi avec la société civile ; en effet, les syndicats ont participé à la consultation et formulé leurs objections et recommandations or rien de ce qui a été exprimé par les organisations des travailleurs n’a été pris en compte dans la communication de l’Union européenne.

Aussi demandons-nous instamment que le mécanisme de dialogue constitue un engagement de dialogue transversal et ouvert et non un simulacre de consultation. Il ressort du mécanisme de consultation que la représentation des grandes multinationales et autres associations d’entreprises s’élève à approximativement 35%. En revanche, la représentation des organisations de la société civile dans les consultations n’atteint que 17%.

En deuxième lieu, s’agissant du contenu, la communication s’inscrit dans un paradigme économique fondé sur le précepte que la croissance contribue invariablement à la création d’emploi et, par-là, à la réduction de la pauvreté. Dans nos pays d’Amérique latine, nous savons que la croissance ne constitue pas une condition suffisante pour la création d’emploi et la réduction de la pauvreté et qu’en revanche il est primordial que les politiques soient orientées vers la création d’emploi et la redistribution.

En troisième lieu, la Commission européenne décrit le développement comme un bien de consommation et non comme un droit pour les citoyens de la planète.

En quatrième lieu, la CE, à travers sa communication, méconnait le rôle de l’État en tant qu’acteur du développement or s’il y a bien une chose dont nous sommes conscients au niveau de notre continent, c’est que quand l’État est absent, le fossé entre les riches et les pauvres se creuse. L’État est un acteur incontournable dans le domaine du développement.

En cinquième lieu, la communication n’énonce pas de façon exhaustive les conditions que doit remplir le secteur privé, en tant qu’acteur du développement, en matière de transparence, de comptabilité et d’appropriation démocratique. Ce sont les principes de la coopération internationale adoptés par tous les membres et dont on essaie aujourd’hui de déresponsabiliser le secteur privé.

La communication fait référence, de façon elliptique, à certains principes volontaires de responsabilité sociale des entreprises mais jamais à des normes contraignantes liées au respect et à la promotion des droits des travailleurs, environnementaux et sociaux. Qui plus est, la communication « encourage » le secteur privé à adhérer aux directives et principes reconnus au niveau international alors que les normes internationales sont de nature contraignante.

Enfin, nous notons avec préoccupation la référence aux systèmes de prêts par « cofinancement » où, d’après ce que nous avons pu comprendre, la communication de la CE prône la privatisation de l’aide et, a fortiori, encourage la participation des multinationales européennes. La société civile doit être très vigilante face au risque d’une nouvelle vague de privatisation que l’Aide officielle au développement tente de faire passer sous couvert de développement."