Crainte des travailleurs justifiée à l’égard de négociations commerciales secrètes

photo: Photo Steve Rhodes

La CSI appelle les États-Unis, l’Union européenne et d’autres partenaires de négociation à créer un système commercial favorable au bien commun, suite aux informations récemment divulguées sur des négociations commerciales secrètes, dont le contenu est alarmant pour les travailleurs.

La Confédération syndicale internationale est préoccupée par les documents révélés sur le site du lanceur d’alerte Wikileaks, qui laissent entendre que l’Accord sur le commerce des services (ACS) va renforcer un peu plus le pouvoir des entreprises et menacer l’intérêt public.

L’inquiétude est particulièrement vive à l’égard des projets de déréglementation et de libéralisation accrues qui concernent le secteur public et les transports. Les dispositions qui encouragent la privatisation et obligent les pays à éliminer les plafonds pour les propriétés étrangères dans les services de télécommunication distribués par le public sont également source de préoccupation.

Ces révélations prouvent que les travailleurs et leurs syndicats à travers le globe avaient raison de craindre les négociations secrètes qui définissent actuellement l’accord commercial entre les États-Unis, l’Union européenne et 22 pays, pour la plupart d’Amérique du Sud.

« Les accords commerciaux passés en secret pénalisent les travailleurs et visent à concentrer toujours plus le pouvoir et la richesse entre les mains des entreprises multinationales, aux dépens du bien commun », déclare la secrétaire générale de la CSI Sharan Burrow.

« Les résultats du sondage d’opinion mondial de la CSI font apparaître qu’une large majorité de personnes sont très préoccupées par l’influence des grandes entreprises ; c’est pourquoi les gouvernements doivent réfléchir à la création d’un système commercial qui soit favorable au bien commun.

« Ces documents indiquent que, sous sa forme actuelle, l’ACS pourrait compromettre les services publics de qualité et redéfinir complètement l’économie des services à l’échelle mondiale, ce qui est d’autant plus alarmant que les conséquences ne sont pas totalement connues, sauf des entreprises qui défendent l’ACS.

« La ‘neutralité concurrentielle’ qui est mise en avant suscite également une forte inquiétude. Ce principe apparemment inoffensif signifie que la fourniture de services publics peut être assimilée à une pratique commerciale inéquitable si elle présente un désavantage, réel ou même supposé, pour un fournisseur privé ».

Aux termes de l’ACS, les gouvernements permettent l’accès au marché et garantissent un traitement national aux fournisseurs de services et opérateurs étrangers dans une multitude de domaines de services, notamment dans les télécommunications, les transports, les services de livraison et divers services professionnels tels que l’architecture, l’ingénierie, la médecine, la consultation et le droit.

La Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) a réagi aux passages divulgués concernant les livraisons express, aériennes et maritimes en affirmant que « le passage à une concurrence plus ouverte est une mascarade, qui offre plusieurs options aux grandes entreprises mondiales pour renforcer un peu plus leur pouvoir par rapport aux nouvelles entreprises mondiales qui arrivent sur le marché ».

« Ce texte permettrait de dynamiser les entreprises les plus puissantes du secteur du transport en leur accordant un traitement préférentiel, ajoute le président de l’ITF, Paddy Crumlin. Mais le texte ne mentionne pas le moindre avantage pour les travailleurs et les citoyens. Il pose d’importants obstacles pour tout État qui souhaite investir dans ses infrastructures nationales, les gérer et les exploiter ou, plus important encore, qui cherche à défendre le travail décent et des conditions décentes dans le secteur du transport.

D’après la secrétaire générale de l’ISP, Rosa Pavanelli, « L’Union européenne et les États-Unis se sont tous deux largement exprimés sur les protections offertes aux services publics, mais ces récentes révélations ne sont pas très rassurantes à ce sujet ».

Philip Jennings, le secrétaire général de la fédération syndicale internationale UNI, souligne le danger des clauses dites de « statu quo » et « à effet de cliquet », qui privent les gouvernements de la liberté de mettre en œuvre de nouvelles réglementations et de la possibilité de revenir en arrière sur la libéralisation.