Birmanie : Résultats préliminaires d’une mission conjointe FIDH-CSI concernant la Birmanie

Suite à la répression brutale des manifestations pacifiques de septembre en Birmanie, la Confédération syndicale internationale (CSI) et la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) ont décidé de dépêcher (...)

Paris - Bruxelles, le 23 octobre 2007: Suite à la répression brutale des manifestations pacifiques de septembre en Birmanie, la Confédération syndicale internationale (CSI) et la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) ont décidé de dépêcher une mission d’enquête à la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie pour recueillir des informations de première main concernant la vague de persécutions. Cette mission avait en outre pour objectif d’amorcer des consultations avec des organisations pro-démocratiques et de droits humains birmanes en vue de la définition éventuelle de stratégies internationales contribuant à la démocratisation du pays.

La mission, composée de quatre membres en provenance d’Australie, de Belgique et de Thaïlande, a effectué des visites à Bangkok et à la frontière thaïe-birmane du 13 au 21 octobre. La délégation a choisi de ne pas se rendre à Rangoon ni dans le centre du pays en raison des risques élevés auxquels seraient exposées les personnes interrogées.
« Nous avons interviewé 13 personnes qui avaient pris part aux manifestations en Birmanie et qui ont dû, par la suite, s’enfuir en Thaïlande. Elles ne pouvaient plus vivre en sécurité en Birmanie dès lors qu’elles étaient pourchassées, que leurs domiciles étaient perquisitionnés et que leurs portraits avaient été diffusés », a signalé Alison Tate, déléguée de la CSI au sein de la mission d’enquête.

« Si des informations exactes et vérifiables ne sont toujours pas disponibles quant au nombre de morts et de blessés, nous pouvons néanmoins affirmer que la répression a été brutale et systématique. La plupart des participants ont témoigné avoir vu des personnes abattues et d’autres battues à mort », a déclaré Gaëtan Vanloqueren, membre de la délégation de la FIDH et porte-parole d’Action Birmanie. C’est la première fois que des moines ont été directement la cible de répression. « Des arrestations ont toujours lieu en ce moment. A présent, lorsqu’une personne recherchée ne se trouve pas à son domicile, le régime prend en otage des membres de sa famille. Le SPDC se livre à des rafles arbitraires en masse à Rangoon et ailleurs », a-t-il ajouté.

D’après les personnes et les organisations interviewées par la mission FIDH/CSI, le SPDC ne se serait pas véritablement engagé dans le sens d’un processus de dialogue politique. « Le régime cherche à gagner du temps de manière à ce que l’attention des médias se dissipe peu à peu. C’est la tactique dilatoire employée par le régime depuis des années. La proposition de Than Shwe est assortie de l’imposition de conditions préalables inacceptables à Aung San Suu Kyi, à un moment où les arrestations en masse et d’autres mesures répressives se poursuivent sans relâche », a déclaré Olivier De Schutter, secrétaire général de la FIDH. D’après toutes les organisations interrogées, la principale priorité en vue de l’amorce d’un dialogue effectif est la libération de l’ensemble des prisonniers politiques, y compris Daw Aung San Suu Kyi et Ko Ming Ko Naing.
La mission d’Ibrahim Gambari, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU en Birmanie, ne peut aboutir en l’absence d’une pression accrue de la part de la communauté internationale. « La communauté internationale doit fixer des objectifs et un calendrier pour l’année à venir et procéder, chaque mois, à une l’évaluation des progrès », a déclaré Guy Ryder, secrétaire général de la CSI.

« Les signaux négatifs envoyés au SPDC doivent être assortis de signes d’encouragement à l’endroit du peuple birman », ont ajouté les délégués Vanloqueren et Tate. Toutes les organisations appartenant au mouvement démocratique birman en exil ont réitéré leur demande en faveur de sanctions sur le commerce et l’investissement dans les trois secteurs économiques « brasseurs » qui assurent un soutien vital au régime militaire, à savoir le pétrole, le bois et l’exploitation minière, y compris les pierres gemmes et les minéraux. Cependant que la Birmanie a enregistré une hausse de l’IDE de l’ordre de 2000% entre 1995 et 2005, 95% de la population vit avec moins de 1 dollar par jour et 90% avec moins de 0,65 dollar par jour. « Les sanctions affectent le régime et l’élite proche du pouvoir, pas le peuple qui vit de l’agriculture ou de l’économie informelle », a-t-il été affirmé en maintes occasions aux délégués de la mission. Quand bien même elles n’auraient pas le même impact qu’un gel des relations commerciales Birmanie-Chine ou Birmanie-ASEAN, aux yeux des démocrates birmans, des sanctions économiques émanant de l’UE représentent une question morale et enverraient un signal positif aux personnes vivant en Birmanie.

Les organisations rencontrées par la mission participent à des consultations et des débats ayant pour objet de dégager des approches pour faire porter aux généraux du SPDC la responsabilité pour les crimes qu’ils ont commis. La plupart des personnes interviewées étaient d’avis que des pressions accrues contribueraient plutôt qu’elles ne porteraient atteinte aux possibilités existantes de dialogue politique.

Les causes profondes des manifestations n’ont pas été prises en considération. La hausse des prix des carburants, les atteintes flagrantes aux droits économiques et sociaux et les restrictions sévères à l’égard des libertés civiles, le mépris absolu pour l’autorité de la loi et l’impunité des autorités attisent plus que jamais la volonté d’un changement.

Si « ça ne s’arrête pas là », comme a signalé un résident birman qui a participé aux manifestations, il incombe d’urgence à la communauté internationale de saisir cette occasion.

Pour reprendre les propos de Daw Aung San Suu Kyi : « Les dictatures ne sont pas éternelles. » Et de poursuivre : « Nous vous exhortons à mettre à profit votre liberté pour promouvoir la nôtre. » Plus que jamais, ces deux citations sont à lire conjointement. Les pays tiers peuvent contribuer à accélérer la transition vers la démocratie.

Disponibilités en vue d’entretiens :

Olivier De Schutter : +32 (0) 2.640.42.95

Gaëtan Vanloqueren : +32 (0) 472.331.771

CSI – Mathieu Debroux : + 32 (0) 476 621 018


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