États-Unis : Un nouveau rapport dénonce des audits bidon dans la filière de production

Un nouveau rapport publié aux États-Unis le mardi 23 avril levé le voile sur l’échec systématique des firmes chargées de la « responsabilité sociale des entreprises » à protéger les travailleuses et travailleurs victimes d’abus dans les chaines de production des entreprises multinationales.

Le rapport intitulé en anglais Responsibility Outsourced (Responsabilité sous-traitée) préparé par la confédération syndicale AFL-CIO des États-Unis révèle comment des firmes d’audit ont certifié des usines au Pakistan et au Bangladesh où des centaines de travailleuses et travailleurs ont péri dans des incendies causés par la négligence liée aux normes de sécurité.

Social Accountability International et Fair Labour Association, deux des protagonistes du secteur de l’audit social, ont été sévèrement critiquées pour avoir manqué de faire participer les salarié(e)s ou même de s’être adressé à eux lors des inspections des lieux de travail. Même lorsque les plaintes révélaient des preuves incontestables de violations des droits des travailleurs, leurs rapports et recommandations prenaient systématiquement le parti des employeurs.

« Tandis que l’écran de fumée des audits sociaux financés par les entreprises se dissipe rapidement, ce rapport siffle le temps mort pour un système dysfonctionnel qui n’a rien fait pour aider les travailleurs et travailleuses engagés dans les rouages les plus impitoyables des chaînes de production multinationales », a dit la secrétaire générale de la CSI, Sharan Burrow.

Toujours selon le rapport, certaines « initiatives multipartites » internationales où les travailleuses et travailleurs ont voix au chapitre, comme le Workers’ Rights Consortium, ont eu une incidence positive en aidant les salariés à négocier de meilleurs salaires et conditions. En revanche, les programmes financés par les entreprises ont souvent suivi le modèle de sous-traitance propre aux entreprises-mêmes dont ils sont censés surveiller les pratiques.

« Le meilleur système pour identifier et régler les problèmes au travail – qu’il s’agisse de la sécurité des travailleuses et travailleurs ou de leur droit de s’organiser – passe par les travailleuses/travailleurs et leurs syndicats eux-mêmes et non pas par un programme de « responsabilité sociale d’entreprise » relevant purement de relations publiques. Les travailleurs savent exactement ce qui se passe sur les lieux de travail, chaque jour, 24 heures sur 24. Les programmes gérés par les entreprises, où des « experts » sont dépêchés sur place et payés pour évaluer les conditions de travail, sont intrinsèquement défaillants dès lors qu’ils manquent de tenir compte de la réalité de tous les jours. Dans certains cas, les vérificateurs peuvent être incités à ne pas rendre un rapport exhaustif ou honnête de ce qu’ils voient. Les programmes de surveillance de la RSE sont, au mieux, limités. Au pire, ils peuvent dissimuler des problèmes et signaler que les conditions de travail sont décentes alors qu’elles ne le sont pas », a indiqué Richard Trumka, président de l’AFL-CIO.

Le rapport, qui inclut des études de cas réalisées en Chine, au Guatemala, en Inde, en Indonésie, au Honduras, au Pakistan et aux Philippines se conclut par des exemples de programmes de conformité mis en œuvre avec une participation effective des travailleurs, y compris des accords-cadres conclus entre des entreprises multinationales et des fédérations syndicales internationales dans différents secteurs.

« La responsabilité en dernier ressort retombe sur les gouvernements. Quand les gouvernements légiféreront pour assurer que les normes de l’Organisation internationale du travail sont appliquées, les employeurs, y compris la plupart des marques internationales les plus connues, ne pourront plus faire passer leur image de marque avant la vie et les moyens de subsistance des travailleuses et travailleurs », a déclaré Sharan Burrow.