L’UE doit faire pression en faveur des droits fondamentaux dans l’industrie de l’habillement au Bangladesh

Le mouvement syndical international a salué l’engagement de la Commission européenne à faire pression sur le Bangladesh en faveur du respect des normes internationales du travail.

La promesse fut rendue publique dans une déclaration commune des commissaires européens Catherine Ashton et Karel De Gucht au lendemain de l’effroyable effondrement d’un immeuble industriel à Savar, au Bangladesh, qui a fait quelque 600 morts et un nombre encore plus élevé de blessés graves, et qui figure désormais au nombre des pires catastrophes industrielles de l’histoire. La menace du recours à des mesures commerciales en vertu du Système de préférences généralisées (SPG), rarement invoqué, souligne d’autant plus la préoccupation de l’Union.

« L’UE doit user de son pouvoir d’influence considérable pour encourager les marques s’approvisionnant au Bangladesh à souscrire un accord contraignant et exécutoire relatif aux normes de sécurité en matière d’incendie et de construction, où les travailleurs et les syndicats jouent un rôle actif », a dit Jyrki Raina, secrétaire général de la fédération syndicale internationale IndustriALL.

« La promotion de l’audit d’entreprise en tant que moyen d’identification et de résolution des failles au niveau de l’industrie se révèle, une fois de plus, comme une cruelle mascarade, d’autant que la firme d’audit BSCI avait récemment délivré des certificats de conformité à plusieurs fabriques basées dans l’immeuble sinistré Rana Plaza », a indiqué Raina. « Une approche volontaire dépendant uniquement de la bonne foi des entreprises – jusqu’ici cruellement absente – serait une erreur. Persévérer dans le sens de la promotion de l’audit social d’entreprise n’est pas une solution au problème », a souligné Raina.

Pour sa part, Sharan Burrow, secrétaire générale de la CSI a déclaré : « Une fois encore, des travailleuses et des travailleurs ont payé de leur vie les liens privilégiés mais, à terme, funestes entre des marques internationales, des fournisseurs sans scrupules et des politiciens corrompus au Bangladesh. L’UE se doit de tenir sa promesse et prendre les mesures qui s’imposent pour empêcher que le simulacre de l’industrie de la RSE ne fasse d’autres dégâts. »

Il est notoire que les ateliers où sont confectionnés les vêtements au Bangladesh pour le compte de détaillants mondialement connus sont des pièges mortels. La situation est aggravée par l’hostilité totale, tant du gouvernement que des associations de l’industrie vestimentaire, à l’égard des syndicats. Le gouvernement a refusé durant de nombreuses années d’enregistrer les syndicats dans le secteur de l’habillement. Ce n’est qu’à force de pressions internationales considérables que de nouveaux syndicats ont obtenu la reconnaissance au cours des derniers mois.

D’après Philip Jennings, secrétaire général de la fédération syndicale internationale UNI, qui organise les travailleuses et travailleurs du secteur du détail : « L’UNI et ses affiliées demandent que les détaillants du monde entier signent un accord exécutoire qui protège les travailleuses et travailleurs au Bangladesh contre les dangers inacceptables liés aux risques d’incendie et aux normes de construction et leur garantisse le plein accès à la meilleure forme de protection de la santé et de la sécurité : Un syndicat. Ils ne peuvent pas se dérober à leur responsabilité – le moment est désormais venu de passer à un engagement concret. »

Aussi la CSI, l’IndustriALL Global Union et l’IndustriAll European Trade Union insistent-elles sur le fait que l’UE doit se garder de traiter la situation comme une question relevant exclusivement du domaine de la santé et de la sécurité. Si les travailleurs ont un syndicat fort, il est beaucoup plus probable qu’ils soient en mesure de négocier pour des lieux de travail plus sûrs et de se mettre rapidement à l’abri de dangers lorsque ceux-ci surviennent. Pour autant, il revient à l’UE de s’assurer que la liberté syndicale soit inscrite au cœur de tout dialogue avec le gouvernement.

Parallèlement, il conviendra de faire pression sur l’industrie et le gouvernement pour assurer que les travailleuses et travailleurs touchent un salaire qui leur permette de subvenir à leurs besoins vitaux. Sous la pression des employeurs, le gouvernement a refusé d’augmenter le salaire minimum mensuel équivalent à 36 dollars.

« Une nouvelle législation conforme aux normes de l’OIT et l’enregistrement effectif des nouveaux syndicats seront primordiaux pour éviter d’autres tragédies à l’avenir. Les réformes au code du travail existant votées récemment par le cabinet manquent totalement de s’attaquer à un grand nombre de questions soulevées par l’OIT et les syndicats concernant la liberté syndicale », a déclaré Sharan Burrow.

« L’UE doit aussi insister que les personnes responsables de la torture et du meurtre du militant syndical Aminul Islam l’an dernier soient arrêtées et jugées sans plus tarder », a dit madame Burrow.

Bernadette Ségol, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES) a appelé la Commission à adopter une nouvelle stratégie dans le cadre du Programme d’action sur la responsabilité sociale des entreprises 2011-2014. « Nous devons veiller à ce que toutes les multinationales opérant en Europe s’engagent au respect de la Déclaration de principes tripartite de l’OIT sur les entreprises multinationales et la politique sociale. »

Un rapport récent de la confédération syndicale étasunienne AFL-CIO intitulé « Responsibility Outsourced » (responsabilité sous-traitée) http://www.ituc-csi.org/IMG/pdf/csreport_final_en.pdf, dresse un bilan accablant des firmes d’ « audit social » financées par les entreprises, y compris des cas où des vérificateurs ont manqué de prendre des mesures dans des usines présentant des risques mortels et ont aidé des entreprises à mettre en œuvre des stratégies antisyndicales s’apparentant à celles employées aux États-Unis.

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