Corée : L’emprisonnement du président de la KCTU est un simulacre de justice

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La CSI qualifie de simulacre de justice la condamnation de Han Sang-gyun, le président de la Confédération coréenne des syndicats (KCTU), à cinq ans de prison pour « entrave à la circulation ».

C’est le tribunal du district central de Séoul qui a rendu ce verdict, s’en tenant aux allégations du ministère public suite à une série de manifestations légitimes organisées en 2015, notamment le rassemblement du 14 novembre 2015 à Séoul, lors duquel 20.000 policiers ont lancé des gaz lacrymogènes et utilisé des canons à eau contre 100.000 personnes. Plusieurs dizaines de manifestants ont été blessés, certains grièvement, et des procédures pénales ont été engagées contre 585 dirigeants et membres de la KCTU ; 20 d’entre eux ont été placés en garde à vue et sept ont été mis en examen. La secrétaire générale de la KCTU, Lee Young-joo, s’est elle-même assignée à résidence au siège de la KCTU en décembre après avoir reçu un mandat d’arrêt.

Sharan Burrow, la secrétaire générale de la CSI, déclare : « La criminalisation d’une manifestation légitime comme celle-là est tout à fait inacceptable, et donne encore plus de pouvoir aux chaebols, ces grands conglomérats industriels coréens qui dominent déjà l’économie. Le parti au pouvoir de la présidente Park Geun-hye a perdu sa majorité parlementaire aux élections d’avril dernier, mais la présidente semble déterminée à laisser les entreprises dicter leur loi sans tenir compte du préjudice qu’elles causent aux travailleurs. La peine prononcée contre Han Sang-gyun montre bien que les tribunaux sont soumis au programme politique d’un gouvernement qui n’a pas la majorité, au lieu de défendre l’État de droit. Le mouvement syndical international va continuer de faire pression pour obtenir la libération du syndicaliste et le retrait de toutes les accusations contre les personnes poursuivies en justice simplement parce qu’elles veulent faire valoir les droits des travailleurs et d’autres libertés fondamentales ».

Dans un courrier adressé à la présidente Park le 15 juin dernier, la CSI écrivait : « Les poursuites pénales contre les dirigeants et les membres syndicaux constituent une violation manifeste des droits fondamentaux et plus particulièrement du droit à la liberté syndicale. Il est regrettable que le gouvernement coréen semble avoir pris l’habitude d’adopter ces mesures de répression pour faire taire les voix dissidentes. C’est pourquoi nous prions instamment votre gouvernement d’abandonner tous les chefs d’inculpation contre les syndicalistes, dont Han Sang-gyun et Lee Young-joo, pour les actions qu’ils ont menées dans le cadre d’activités syndicales pacifiques et légitimes. Nous demandons également de mettre un terme à la criminalisation des dirigeants et militants syndicaux. Nous vous appelons en outre à réexaminer le cadre juridique national en concertation avec les organisations syndicales et les organisations de la société civile afin d’empêcher de tels abus à l’avenir ».

Cho Sung-deok, le vice-président de la Fédération syndicale coréenne des travailleurs des services publics et du transport (KPTU) est lui aussi sous le coup d’une accusation suite à la manifestation du 14 novembre. Le ministère public réclame une peine de cinq ans d’emprisonnement.

Maina Kiai, le rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, a remis un rapport au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en juin concernant Han Sang-gyun et le défenseur des droits humains Park Lae-goon pour signaler que « le fait d’accuser au pénal les participants aux rassemblements, en invoquant notamment l’entrave à la circulation, criminalise de facto le droit aux réunions pacifiques ».