Le Danemark change son approche à l’égard de la coopération au développement

Le Gouvernement danois opère un changement de cap en ce qui concerne les modalités liées à la partie de la coopération au développement déléguée à des ONG. Les priorités se rapprocheront davantage des objectifs politiques.

Par Jacob Rosdahl, Conseil LO/FTF

À partir de l’exercice 2018, les modalités d’une grande partie de l’aide financée par le gouvernement et de la coopération au développement assurée par les organisations de la société civile et les ONG danoises passeront d’un système basé sur un cadre à un système stratégiquement modelé sur les objectifs politiques actuels.

Les fonds gérés par les ONG représentent une enveloppe d’environ 135 millions d’euros par an. Ces changements auront une incidence sur le nombre d’ONG se consacrant à la coopération au développement qui seront éligibles dans le cadre des accords de financement gouvernementaux de 4 ans. Ce qui, par ailleurs, changera les critères des programmes et projets de coopération au développement. Autre changement important : l’introduction d’une procédure de passation des marchés publics pour l’adjudication du financement. À l’avenir, les organisations seront mises en concurrence pour décrocher les fonds gouvernementaux.

Les nouvelles modalités reflètent la volonté du gouvernement de transformer les actuels accords-cadres de 4 ans en accords de partenariat stratégique (APS). Jusqu’à présent, les ONG pouvaient mettre en place des approches de développement à long terme de façon quelque peu individuelle et indépendante. L’actuelle transition vers des APS suppose une adéquation plus étroite des approches et programmes de développement de chaque ONG aux priorités du gouvernement danois.

Remise en cause de l’approche sur le long terme

Mads Bugge Madsen, directeur du Conseil LO/FTF, c.-à-d. l’organisation de coopération au développement du mouvement syndical danois, déclare que le changement des modalités pourrait représenter la fin de l’approche fondée sur le long terme de la coopération au développement :

« Les ONG devront solliciter des fonds tous les quatre ans, ce qui signifie que les organisations qui s’alignent le mieux sur les stratégies et priorités de développement du gouvernement gagneront. Cette approche remet en cause les approches de développement à long terme, mais aussi le concept même de la société civile », déclare-t-il.

Actuellement, 17 ONG de l’accord-cadre sont financées par le budget de l’État danois. Le Conseil LO/FTF en fait partie. Les autres sont notamment la Croix-Rouge, CARE, Save the Children, Oxfam, ActionAid, DanChurchAid, le Conseil danois pour les réfugiés, etc.

Accent sur les intérêts danois

Les intentions du gouvernement danois de droite quant à la promotion de ces changements sont considérées comme double. L’objectif consiste, d’une part, à réduire le nombre d’APS par rapport aux anciens accords-cadres et, d’autre part, à accorder le financement à la stratégie et aux priorités de la coopération au développement récemment approuvé pour le Danemark. Cela permettra au pays d’être en mesure de répondre rapidement aux crises et problèmes mondiaux tels que les migrations et les réfugiés.

Les quatre nouveaux axes prioritaires sont : la réduction de la pauvreté, les intérêts de sécurité nationale danoise, les intérêts commerciaux danois et la migration. Simultanément, le nombre de pays pauvres admissibles à l’aide danoise diminue et l’accent est davantage placé sur les économies en transition et sur les marchés émergents.

« Cela démontre un intérêt accru dans la croissance économique et l’emploi tout en réduisant l’intérêt porté à la pauvreté, et ce, même s’il s’agit de l’un des objectifs déclarés. Les mots-clés sont donc “intérêts danois”. Dans l’ensemble, les priorités abordent la croissance économique et l’emploi dans l’économie formelle, mais laissent beaucoup à désirer lorsqu’il s’agit de l’économie informelle. Ce qui m’inquiète en outre est de savoir si une définition trop étroite et trop vague de la croissance économique et de l’emploi pourrait négliger le secteur public », déclare Mads Bugge Madsen.

Modalités pour les problèmes du marché du travail

Le nouveau système comprend trois modalités : La première est la modalité de passation des marchés publics relatifs aux aides au développement gérées par des ONG, la deuxième est une modalité attendue pour les OSC de moindre importance et la troisième est une modalité conçue pour les questions liées à l’emploi, à la croissance économique et au marché du travail. Cette dernière sera la modalité la plus appropriée pour le Conseil LO/FTF et les autres acteurs du marché du travail pour l’obtention de financements.

L’ensemble du processus de conception et d’acquisition du changement des modalités est encore vague et le ministère des Affaires étrangères n’a que très peu communiqué à ce sujet. Toutefois, il est probable que tout le processus de demande soit terminé vers le mois de juin, échéance pour la proposition du projet de loi de finances pour 2018.