Dialogue social : Un objectif stratégique de la coopération au développement de l’UE « mis à jour » ?

La Commission européenne a organisé un séminaire consacré spécifiquement au rôle du dialogue social dans le développement. L’événement s’est déroulé le 25 mai avec la participation des organisations partenaires internationales et européennes et en présence de l’Organisation internationale du travail (OIT)*.

En réalité, le dialogue social et les partenaires sociaux ont été présents dans le cadre de la politique de développement de l’UE depuis de nombreuses années déjà, en commençant par le Consensus européen pour le développement (2005), les Conclusions du Conseil sur la promotion du travail décent pour tous (2006) et la promotion de l’emploi à travers la coopération au développement de l’UE (2007). Ces documents faisaient essentiellement référence aux objectifs du travail décent en général et à l’importance d’une participation des organisations des employeurs et des travailleurs mais se gardaient, dans certains cas, de faire spécifiquement allusion au dialogue social.

Cette initiative organisée par la DEVCO s’est avérée d’autant plus opportune et pertinente à la lumière du regain d’intérêt que suscite le rôle attribué aux partenaires sociaux dans le cadre du Programme pour le changement [1]. Le séminaire a porté sur les résultats d’une étude de faisabilité réalisée à la demande de DEVCO concernant le renforcement du dialogue social dans le cadre de la coopération au développement de l’UE. Les participants ont, dès lors, eu l’occasion de formuler des recommandations quant aux approches possibles pour soutenir concrètement le dialogue social à l’avenir, y compris la prochaine phase de planification du programme de financement de l’UE en question [2].

La différentiation entre le dialogue civil et le dialogue social, le premier ressortant à la société civile au sens large et le second relevant spécifiquement des organisations des partenaires sociaux et encadré par des objectifs de dialogue social et des structures bien définis a été particulièrement saluée. Afin de rendre le dialogue social opérationnel, les partenaires sociaux devront être soutenus pour ce qui a trait à leur capacité à répondre aux besoins de leurs membres, à poursuivre la sensibilisation et l’analyse économique et à participer aux cadres de dialogue initiaux (dialogue bipartite). Le soutien au dialogue social doit être traité comme un processus à long terme et progressif, ce qui sous-entend aussi une adaptation des modalités de financement de l’UE, passant d’approches universelles à des approches davantage basées sur les acteurs et les besoins (comme, par exemple, la facilitation de la coopération sud-sud).

En tant que chef d’unité DEVCO, Hélène Bourgade a attiré l’attention sur le fait que le dialogue social et le travail décent en général peuvent s’avérer des « priorités » extrêmement difficiles et politiquement délicates à soutenir par l’UE vis-à-vis de gouvernements partenaires, où les démocraties sont souvent « balbutiantes » et les partenaires sociaux sont rarement consultés dans le cadre de la planification de la coopération pour le développement. À ce propos, les participants ont mis en exergue le rôle des organisations internationales qui, outre le développement des capacités, sont aussi en mesure d’apporter un soutien considérable pour ce qui a trait à l’évaluation des besoins et la cartographie politique des organisations les plus représentatives sur le terrain, sans oublier les cadres institutionnels tels que les programmes de pays de l’OIT pour le travail décent.

À la lumière de ces considérations, la principale demande finalement soumise à la Commission par la délégation syndicale (avec le plein consensus des organisations des employeurs) portait sur l’établissement d’un « cadre politique permanent » avec les partenaires sociaux, ouvrant la voie au dialogue et à la consultation en vue de la conception et de la mise en œuvre de politiques de coopération au développement de l’UE centrées sur le dialogue social. Si cet objectif est atteint, il marquerait le franchissement d’une étape charnière en ce qu’il articulerait le dialogue social en tant que priorité stratégique de la coopération au développement de l’UE et pourrait engendrer des contributions novatrices en faveur du dialogue social global, notamment eu égard à la formulation du futur instrument de l’UE pour la coopération au développement.

Article de Paola Simonetti

* CES, RSCD-CSI, CSI Afrique, LO-FTF Council, FGTB Belgique, TUC Ghana TUC ; OIE et plusieurs organisations des employeurs nationales ; Actemp/Actrav et Département du dialogue social de l’OIT.

Notes

[1Cf. Programme de l’UE pour le changement, p. 6

[2Plan d’action annuel 2003 dans le cadre du programme de Développement social et humain (Investing in People -IIP)